Gel des pourparlers intersyriens, se donner le temps nécessaire pour une reprise efficace

L'émissaire de l'ONU Staffan de Mistura a décidé de suspendre préventivement les pourparlers de paix sur la Syrie à Genève jusqu'au 25 février, pour éviter que ceux-ci, lancés dans la grande confusion en raison des difficultés à réunir les belligérants, ne déraillent pour de bon.

N'ayant pas parvenu à réunir les parties empêtrées dans le conflit inextricable en Syrie (gouvernement/opposition), le diplomate onusien a annoncé mercredi la suspension, pour une vingtaine de jours, des discussions lancées le 29 janvier dans la capitale suisse.

Il ne s'agit pas là, d'un jet définitif de l'éponge, mais d'une pause qui sert à reculer pour mieux sauter, c'est en tout cas ce que laisse sous-entendre M. de Mistura en annonçant la suspension des pourparlers de paix, qui n'ont jamais décollé depuis l'arrivée des délégations de Damas et de l'opposition vendredi et samedi dernier. "Il y a encore du travail à faire", a déclaré M. de Mistura. 

Staffan de Mistura tente depuis près d'une semaine de lancer un processus de discussions indirectes entre les parties en conflit en Syrie, pour tenter d'amorcer une solution politique à la crise en Syrie, qui a fait plus de 260.000 morts et des millions de réfugiés en près de cinq ans.

Les discussions de Genève sont censées enclencher un processus politique qui conduirait à la formation d'un organe de transition dans les six mois. Mais les interprétations divergent sur cet organe, l'opposition et ses soutiens réclamant une autorité de transition sans le président syrien Bachar al-Assad, Damas et ses alliés notamment russes envisageant un simple gouvernement élargi à l'opposition.          

                        Les raisons d'une suspension

Nombreuses sont les spéculations ayant accompagné la suspension des discussions sur la Syrie. Alors qu'il tentait, jusqu'à la dernière minute, de ranimer les discussions, de Mistura a reconnu que "le niveau de confiance entre les deux parties était proche de zéro". 

D'un côté, l'opposition continue à réclamer l'arrêt des bombardements contre les civils, la libération des détenus et la levée des sièges des villes syriennes, le gouvernement syrien affirme ne pas avoir trouvé à Genève de partenaire "sérieux" pour négocier.

"Nous n'avons pas trouvé d'opposition, mais des oppositions et des groupes en divergence", a dit le chef de la délégation syrienne au dialogue inter-syrien à Genève, Bachar Jaafari, soulignant qu'il y avait "un problème dans l'absence d'une liste des noms des opposants et des terroristes".

Néanmoins, le diplomate syrien a assuré que Damas "était prête au dialogue et à la coopération avec toutes les parties responsables qui ont un intérêt véritable dans l'aide au gouvernement syrien pour arrêter l'effusion de sang en Syrie".      

Quant à la situation humanitaire, Bachar Jaafari a indiqué que "Damas avait admis de faire parvenir de l'assistance à Madhaya, Mouadhamiya, Tell, Kafraya et Fouaa".

"Le paramètre humanitaire touche le gouvernement syrien avant de toucher n'importe quelle autre partie", a-t-il noté.

                La communauté internationale tenue pour responsable

Depuis Londres, le secrétaire général de l'ONU, Ban Ki-moon, qui prend part à la 4eme Conférence des donateurs pour les réfugiés syriens, a estimé que la communauté internationale avait "une lourde responsabilité pour n'avoir pas pu mettre fin à la situation difficile que vit la Syrie".

Par ailleurs, M. Ban, a souligné que sauver la population syrienne ne peut pas se faire seulement avec une solution militaire mais qu'il fallait "changer de discours, et permettre une voie à la solution politique", regrettant que les pourparlers de Genève n'ont pas encore démarré. 

De leurs coté, les Etats-Unis ont jugé que les frappes russes en Syrie mettaient en péril le "processus de paix" amorcé sur le conflit et étaient "en partie" responsables de la suspension de discussions indirectes inter-syriennes à Genève sous l'égide de l'ONU.

Mais pour Moscou, il n'est pas question de cesser ses frappes en Syrie avant d'y avoir "réellement vaincu" les groupes terroristes.

"Les frappes aériennes russes ne s'arrêteront pas tant que nous n'aurons pas réellement vaincu les organisations terroristes, dont le groupe autoproclamé "Etat islamique" (EI/Daech) et le Front Al-Nosra", la branche syrienne du réseau terroriste Al-Qaïda, a déclaré récemment le chef de la diplomatie russe Sergueï.

Néanmoins, la Russie regrette la suspension des pourparlers de paix sur la Syrie, et s'attend à un deuxième round de discussions "compliqué" le 25 février, a indiqué jeudi le Kremlin.

"Nous regrettons ce développement mais personne ne s'attendait à ce que tout soit simple et rapide", a déclaré le porte-parole du Kremlin, Dmitri Peskov.

"Il est clair que la suite va être compliquée et nous espérons qu'après cette pause, il y aura bien le prochain round de ces négociations très complexes", a-t-il ajouté.  

Le conflit syrien a fait plus de 260.000 morts depuis mars 2011 et poussé à l'exode plus de la moitié de la population du pays.

APS

Monde, Syrie