La chanteuse catalane Lidia Pujol régale à Bejaia

La chanteuse Catalane, Lidia Pujol, a régalé lundi soir le public du Théâtre régional de Bejaia, en lui offrant une balade musicale et poétique d'une rare sensibilité.

Durant deux heures, elle a déroulé un répertoire d’une quinzaine de chansons d’amour, qui bien qu’incomprises par l’auditoire, dans leur sens intégral ont fait mouche tant l’artiste a fait preuve de subtilité d’interprétation et d’enthousiasme.

En fait d’emblée, elle s’est évertuée à dépasser le handicap de la langue et à resserrer sa proximité avec le public. Elle est d’abord rentrée par la grande porte, micro à la main, à l’instar du public retardataire, traversant et chantonnant micro à la main l’allée principale avant de s’installer sur scène.

Et pendant sa traversée, elle a pris le temps de serrer des mains, lancer des sourires et faire des clins d’oeil, toucher des mèches de cheveux et susurrer dans quelques oreilles. Il ne fallait pas tant, pour détendre l’ambiance et captiver. 

Comme si cela ne suffisait pas, elle a mêlé à son tour de chant des compositions de musique andalouse, qui ont eu pour effet de transporter littéralement son auditoire.

Accompagné, à l’occasion de la voix, de Mohamed Ayoub et du violoniste, Mohamed Slimane, tous deux de l’orchestre Arabe de Barcelone, la soirée a nettement pris des allures d’une fête Constantinoise intime. 

"On n’a pas beaucoup bougé. On était venu écouter le chant populaire Catalan. On a échoué en Andalousie", a opiné, Sarah, visiblement, réjouie de la tournure de cette partie du spectacle.

Mais pas seulement, Lidia Pujol a eu la bonne inspiration de rester fidèle à sa première chanson dont le contenu, écrit par le poète philosophe Catalan en 1315, était toute une invitation à l’amour et à la compréhension de l’autre.

Et le patrimoine commun partagé des deux coté de la rive méditerranéenne a vite fait de resurgir, pour mettre et la chanteuse et le public en harmonie.

"L’oiseau chantait dans le verger de l’Aimé. L’Ami vint et dit à l’oiseau: -Si nous ne comprenons pas à travers le langage, comprenons nous à travers l’amour", répétait-t-elle dans une strophe, goulûment mordue pour en extraire le feu.

Ses textes sont ciselés et poignants souvent interrogatifs, magnifiés il est vrai, par une musique, simple, distillée par un orchestre tout aussi simple (un violent, une contrebasse, un bendir). Leur composition savoureuse et leur harmonie majestueuse injectent le frisson et installent la félicité.

"Dis Fol, qui en sait le plus sur l’amour: celui qui en tire plaisir ou celui à qui il en coûte et qui languit ? Il répondit que si l’un ou l’autre manquait, on ne pouvait connaître l’amour", a-t-elle déclamait dans une autre chanson, interprétée à la manière d’un achawik (chant mélodieux et taciturne kabyle) et qui a valu un scotch général à l’assistance.

Robe blanche en dentelle, pieds nus et le visage à peine visible sous une chevelure aux quatre vents, Lidia, à l’allure mi-ange, mi-sauvage, a manifestement pris du plaisir en chantant mais aussi a donné du plaisir pour son public qui s’est montré plein de gratitude en lui accordant un long et enthousiaste standing ovation.

Le concert, suivi par un tour de champ andalous, exécuté par l’association de "h’bab Saddek Lebdjaoui" a été programmé en signe de célébration du 700eme anniversaire de Raymond Lulle, qui a séjourné aux moyens ages à Bejaia et qui a rendu compte d’un témoignage unique sur ses "disputes" alors avec les ulémas de Bejaia, plus connus sous le nom des "princes de la science", qui sont, désormais une référence, historiques et  scientifique sur les échanges interculturels et civilisationels en Méditerranée.

Ce thème, sera du reste au centre du colloque international programmé, ce mardi à Bejaia, sous le générique de "Perceptions actuelles des disputes Raymond Lulle-Ulémas de Bejaia", en présence de chercheurs d’universitaires, venus de Tunisie, Espagne, Italie, Pays-bas.

Des personnalités marquantes y seront également présentes, à l’instar de Said Chibane, ancien ministre des affaires religieuses, Mustapha Chérif, philosophe, ancien ministre également, Monseigneur Henri Tessier, archevêque émérite d’Alger, Roger Albinyaha Saigi, directeur général de l’institut européen de la Méditerranée, et tant d’autres.

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