Décès d’Amar Ezzahi, l'un des maîtres du Chaâbi : le président Bouteflika lui rend hommage

Le maître de la chanson chaâbi Amar Ezzahi, 75 ans, est décédé mercredi après midi à son domicile à Alger, a-t-on appris auprès de son entourage.

Le célèbre interprète du chaâbi (1941-2016) avait été hospitalisé en septembre dernier à Alger pour un malaise. 

Amar Ezzahi était en attente d'être transféré dans un établissement hospitalier spécialisé à l'étranger, selon le ministre de la Culture, Azzedine Mihoubi, qui avait posté l'annonce sur sa page Facebook il y a dix jours.

Le président de la République rend hommage à une icône de la chanson chaâbi

Le président de la République, Abdelaziz Bouteflika a indiqué que l'Algérie perdait en Amar Ezzahi "une icône de la chanson chaabie et un talentueux créateur qui a passé sa vie au service du patrimoine musical national et qui a légué au champ culturel des chansons éternelles".

"J'ai appris avec affliction le décès d'Amar Ezzahi, une icône de la chanson chaabie et un talentueux créateur qui a passé sa vie au service du patrimoine musical national et qui a légué au champ culturel des chansons éternelles", a écrit le Chef de l'Etat dans un message de condoléances à la famille de l'artiste, décédé mercredi après midi.

"La communauté artistique et tous ses fans continueront pendant très longtemps de fredonner ses chansons", a écrit le Chef de l'Etat dans son message rappelant que le défunt était de "cette élite d'artistes pionniers dans leur genre qui ont gratifié leur public d'une oeuvre mémorable et enrichi la scène artistique nationale d'un patrimoine de chansons reflétant un goût raffiné".

Le président Bouteflika d'ajouter qu'"avec la disparition d'Ezzahi,l'Algérie perd une icône de la chanson chaabie et un artiste virtuose dont l'oeuvre alliant modernité et authenticité inspirera à jamais les créateurs".

"Ezzahi nous quitte mais son oeuvre, éternelle, ne cessera de marquer l'histoire de l'art et les générations montantes", a ajouté le président de la République.

Le chef de l'Etat a adressé ses "condoléances les plus attristées à la famille du défunt priant Dieu Tout-Puissant de lui accorder Sa sainte miséricorde et de l'accueillir en Son vaste Paradis".

Amar Ezzahi inhumé jeudi au cimetière d'El Kettar à Alger

Le maître de la chanson chaâbi Amar Ezzahi, décédé mercredi après midi à son domicile, sera inhumé jeudi après-midi au cimetière d'El Kettar à Alger, a-t-on appris auprès de son entourage.

Sa dernière apparition sur scène remonte à 1987 à Alger lors d'un concert à la salle Ibn-Khaldoun. 

Vie et Parcours de l'artiste

De son vrai nom Amar Aït Zaï, né 1er janvier 1941 à Ain El Hammam (Tizi-Ouzou), C'est en écoutant Boudjemaa El Ankis, dans les années 60, qu'il aima le chaâbi.

Sa première rencontre avec la musique fut avec une dame Allemande qui lui apprenait le piano...

Ezzahi se fera un chemin dans le chaâbi après la rencontre en 1963 avec cheïkh Lahlou et Mohamed Brahimi dit cheïkh Kebaïli qui le conseillèrent et l'encouragèrent tout en lui remettant des anciennes qacidate et l'initièrent au rythme de la chanson de ces textes. La suite, il la fera avec Kaddour Bachtobji qui l’accompagnera durant près de deux décennies, avec lequel il a commencé à travailler en 1964. Il écoutera d’une oreille attentive les compositions de Mahboub Bati.

Ezzahi put alors développer sa pratique musicale. Autodidacte, il apprendra le chaâbi sur le tas.

Son premier enregistrement date de 1968, Ya djahel leshab et Ya el adraâ furent les deux premières chansons de son premier 45t qui le propulseront parmi les meilleurs chanteurs de sa génération. La musique et les paroles étaient de Mahboub Bati. En 1971, il enregistre trois 45t et en 1976, deux 33t. II compte trois chansons à la radio et quatre autres à la télévision. Comme Sali trache qelbi, Dik echemaâ et autre Mahajti b’dhya chemaâ.

Sa première cassette « Ya rab El I bad » sort en 1982, s’en suit après quelques enregistrements en studio, entre autres « Ya Dif Allah, El Djafi, Hadjam El Ouala3ine, Ya Kadi nass El Ghram, Nabiwni Radou Ledjouab…. » et la célèbre « Zennouba ».

Modeste, réservé, se confiant rarement, fréquentant souvent le café ''El Kawakib", Ammar Ezzahi, l'un des plus brillants interprètes du chaâbi des années 70, disparaît pratiquement de la scène artistique à partir de 80 et n'est présent que lors des fêtes familiales. Il réapparaît le 10 février 1987 dans un récital à la salle Ibn Khaldoun à Alger, où il interpréta entre autre « El Kaoui, Ghadder Kassek Ya Ndim, Taleb Tiri Aalla, Mekka ya El Haoui, El Harraz » avant de s'effacer à nouveau.

Depuis 2000, Ezzahi n'a plus réapparu en public et est rarement retourné à El Kawakib « l’Etoile de la Rampe Vallée », par suite de problèmes de santé. Le chanteur le plus populaire et le plus talentueux de sa génération est maintenant considéré comme une véritable énigme dans le monde de la musique.

Totalement retiré du circuit des médias depuis plusieurs années, Ezzahi laisse ses nombreux admirateurs sur leur faim. Sans doute, décèlera-t-on, ce trait de caractère dans l’une de ses premières chansons. « Ô lune, je n’ai pas besoin que tu te poses dans mes bras Je n’ai pas besoin que les étoiles me gratifient d’une danse nadawia » Une complainte comme il en a tant chanté.

C’est que l’homme a horreur des mondanités et du superflu. Modeste, simple et généreux, intolérant face à la verbosité et aux excès, il a fait du chaâbi sa raison de vivre. Sa renommée, il la doit à son immense talent qu’il met à la disposition des humbles gens comme lui. S’il refuse de se produire devant le grand public, il trouve en revanche un immense plaisir dans les réunions familiales intimes, car, dit-il, « chanter devant un petit parterre d’amis et de connaissances vaut toutes les sensations du monde »

Orphelin de mère et de père, Ezzahi a longtemps vécu avec sa seule tante. Celle-ci est décédée il y a quelques années, créant un vide dans la vie de Ammar qui a ainsi retrouvé très vite cette solitude qu’il l’a toujours poursuivie et qui a fait de lui un être presque introverti. Le chaâbi, ce compagnon inséparable, l’a-t-il sauvé et soulagé ? Probablement. Car Ammar a quitté si vite l’enfance.

Au contact de la musique, il sut qu’il avait trouvé ce qu’il cherchait, un moyen d’exprimer ses émotions, un univers à découvrir qui le protégerait de tout. De la peur, de la solitude, de la tristesse. Jeune donc, il vouait une grande admiration à Boudjemaâ El Ankis, qu’il a d’ailleurs imité à ses débuts. L’élève et le maître se sont par la suite côtoyés, appréciés. El Ankis ne tarit pas d’éloges sur son cadet.

Amimar a toujours été du côté des humbles, des « zaouali » comme il se définit lui-même. Il a ainsi animé sans compter des fêtes gratuitement pour les petites gens aux revenus modestes.

C’est sans doute parce qu’il est l’un des Zaoualiya, que Ammar s’est paré de cette popularité que nul ne peut lui contester. Il l’a arrachée par son talent bien sûr, mais aussi par son acharnement à atteindre l’objectif qu’il s’était fixé. Il savait que pour entrer dans les univers musicaux si variés, il lui fallait des clefs et que seul un travail de tous les instants pouvait les lui donner. Ammar a bossé durement en solo.

Le petit Ammar a fait du chemin pour appartenir désormais à la lignée des grands maîtres qui se disputent l’héritage musical d’El Anka.

D’ailleurs avec El Ankis et El Hachemi Guerrouabi, il était l’un des derniers monuments du chaâbi. Mais Ammar, à l’inverse de ses collègues, n’aime pas la publicité sur sa personne. Il a ainsi une sainte horreur des salons officiels, préférant la discrétion aux paillettes des usines à rêves.

Il pensait que la presse n’a pas de raison à s’intéresser à lui. Ainsi, il refuse les interviews. S’il refuse de communiquer avec la presse, « ce n’est pas par susceptibilité, mais parce qu’il est convaincu qu’il n’a rien qui puisse justifier la médiatisation. », assure son compagnon El Kobi.

Son dernier concert remonte à presque une décennie, lorsqu’il avait fait un tabac à la salle Ibn Khaldoun. Il avait signé son grand retour après une longue éclipse. Depuis, il s’est retiré jusqu’à ce que les enfants de son quartier lui organisent, au crépuscule de ce siècle, une fête en son honneur pour célébrer ses 59 ans.

C’est avec son mandole qu’il s’exécuta et chanta avec les tripes les meilleurs morceaux du richissime patrimoine culturel algérois entre autres Youm el djamaâ et Djari ya djari.

En 2002, le chanteur sera hospitalisé en urgence à l’hôpital de Baïnem pour une hyperglycémie. Il se rétablira, alors que ses fans dans tous leurs états. Avec un seul orchestre, il faisait un carton. Ammar est humain, profondément humain. Il animait des fêtes de mariage, parfois gratuitement et il ajoutait même parfois de sa poche des cadeaux pour les futurs mariés.

Beaucoup de jeunes tentent de l’imiter, mais ils n’arriveront jamais à l’égaler, car il est unique dans toute l’acception du terme. »

Il continuait à animer les fêtes familiales restreintes. Ses fans le suivent dans les fêtes de famille, et enregistrent sa musique, qu'ils copient et vendent à plusieurs milliers d'exemplaires, en attendent de lui le cadeau tant espéré : qu’il se décide enfin à leur offrir un concert public...

Ses fans Depuis la mort d'El Hadj Mohamed El Anka, connu comme "le Cardinal", Ezzahi a été largement considéré comme son successeur dans une lignée de grands maîtres du châabi, bien qu'il évite les médias et en dépit de forte concurrence des disciples d'El Anka.

 

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