Mouloud Mammeri revisité à Oran : littérature et cinéma au centre des débats

Les rapports entre la littérature et le cinéma ont été au centre des débats dimanche lors de la deuxième journée du colloque consacré à Mouloud Mammeri "L’oeuvre mammérienne revisitée à l’aune du 7e Art", organisé à Oran dans le cadre de la célébration du centenaire de la naissance de cet auteur.

Pour le cinéaste et enseignant à la faculté des langues étrangères de l’Université Oran 2, Mohamed Bensalah, les rapports entre la littérature et le cinéma est une longue histoire de querelles et de malentendus.  

"On demande au film d’être scrupuleusement fidèle à l’oeuvre dont il s’inspire, alors que le passage d’un langage à l’autre s’accompagne nécessairement d’une transformation, fruit de la rencontre profonde de deux créateurs", a-t-il souligné.

Il a rappelé, dans ce sens, que Mouloud Mammeri, interrogé à propos de son roman "L’Opium et le bâton", adapté à l’écran par Ahmed Rachedi, disait "je n’attends pas une translation fidèle, les choses ne pouvant se dire que différemment au cinéma. Rachedi a suivi très fidèlement le roman", indiquant par là que "le roman et le film sont deux langages différents" dans une déclaration faite à la presse 48 heures avant sa mort.

M. Bensalah estime "qu'un texte porté à l’écran cesse d’appartenir à la littérature, car les mots performés par un acteur entrent en relation avec les autres composantes du langage filmique (décor, cadrage, le découpage,...)."

Concernant l’adaptation des textes littéraires algériens au cinéma, Mohamed Bensalah a indiqué qu’elle est rare.

"El Hariq", feuilleton télévisé de Mustapha Badie, adapté à partir de la trilogie de Mohamed Dib, "Le vent du sud" de Benhadouga, adapté par Slim Riad, "L’Opium et le Bâton" et "La colline oubliée" de Mammeri, adaptés à l’écran respectivement par Ahmed Rachedi et Abderrahmane Bouguermouh et "Morituri" et "Ce que doit le jour à la nuit" de Yasmina Khadra, portés à l’écran par Touita Okacha et Alexandre Arkadi, constituent des exceptions, selon M. Bensalah qui a déclaré qu' "il est temps de faire table rase des clichés tenaces concernant les rapports entre la littérature et le cinéma et d’abolir les frontières entre les arts".

L'enseignant Amine Chorf, de l’Université "Abdelhamid Ibn Badis" de Mostaganem, a, pour sa part, estimé "qu'à l'ère des multimédias, l’enseignement de la littérature devient difficile, car les étudiants vont vers la littérature à travers d’autres médias que le livre", critiquant la séparation entre littérature et le cinéma qui "sont différents, mais appartiennent au même univers".

Pour cet universitaire, ces questions posent le problème de la formation même des étudiants, soulignant que "le monde universitaire doit s’adapter aux nouveautés".

Le critique de cinéma Ahmed Bedjaoui a soutenu, de son côté, que l’adaptation ne s’arrête pas uniquement au film et à l’£uvre littéraire, mais au public et le texte écrit et la relation entre le public et le film.

Revenant sur l’histoire du cinéma mondial, Ahmed Bedjaoui a souligné qu’avec l’apparition du cinéma parlant, les réalisateurs ont fait parfois appel aux écrivains de renom comme William Faulkner et bien d’autres. APS 

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