La psychanalyse, une superstition des Argentins !

L’Argentine détient le record du nombre de psychologues par habitant et il y bien une chose que les Argentins ne rateront pour rien au monde : leur séance chez le psy ! Il y a même un quartier appelé « Ville Freud ».

Buenos Aires confirme, de par ses quartiers, sa réputation de ville aux plus nombreux psychologues par habitant. Il y a un divan disponible pour cinq cents Argentins.

Tandis que l’on peine à réunir trente universitaires intéressés par la psychanalyse à Copenhague, à Munich ou à Prague, sans parler du berceau viennois, et alors qu’ont déserté les foules attentives qui se pressaient jadis dans les grandes villes des États-Unis, il est possible de rencontrer 480 étudiants et intellectuels venus écouter une série de conférences lacaniennes à Santiago de Estero (Argentine, 250 000 habitants), des centaines d’autres s’inscrivant à des sémi-naires dans les villes de Pasto (Colombie), de Pelotas (Brésil) ou de Tuxtla Gutiérrez (Mexique).

Buenos Aires est la deuxième ville du monde, après New York, en nombre de psychanalystes. Et sans doute s’agit-il là d’une litote, car elle serait la première si l’on prenait en compte non seulement les listes des associations mais les praticiens hors cadre officiel, non réglementés, de la psychanalyse.

Malgré les indéniables progrès accomplis par les « sciences cognitives et du comportement » (si nous utilisons les critères statistiques de la sociologie de la connaissance), les écoles latino-américaines de psychologie qui dispensent un enseignement à « orientation psychanalytique », prédominante dans les universités, sont nombreuses. Cela n’existe pas ailleurs; à part les cas de la France, de la Belgique et peut-être de la Suisse, la psychanalyse est partout enseignée et discutée dans les départements de lettres, de philosophie ou de cultural studies.

À quoi est dû ce succès retentissant d’une discipline qui a émergé en Europe centrale, s’est développée dans des métropoles et a été véhiculée par des langues autres que nos deux langues ibériques, étrangères à nos cultures monolingues de pays définitivement périphériques ?

L’œuvre de Freud passa en langue espagnole par le biais du grand philosophe José Ortega y Gasset qui lança à travers son disciple et ami Luis López Ballesteros une première traduction des Obras Completas bien avant que celles-ci ne fussent achevées (en 1922) et alla même au-delà des Versammelte Schriften. Une traduction fort heureuse (Freud en personne, bon connaisseur de l’espagnol, en fit un éloge enflammé).

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