Conférence sur "La littérature algérienne en exil" à Alger

Une conférence sur le thème de "La littérature algérienne en exil", a été animée samedi à Alger par des académiciens chercheurs, qui sont revenus sur le parcours et le contexte environnant de plusieurs auteurs établis à l'étranger ou s'exprimant dans la "langue de l'autre", à l'occasion de la Journée nationale de l'émigration.

Organisée par l'Agence algérienne pour le rayonnement culturel (AARC) en commémoration de la Journée nationale de l'émigration, marquant le 59e anniversaire des massacres du 17 octobre 1961 cette rencontre a été animée à la villa Dar Abdeltif, par six universitaires et traducteurs qui ont évoqué l'attachement profond et indéfectible des écrivains algériens établis a l'étranger à la mère patrie, qu'ils ont exprimé dans une production littéraire de "haute esthétique".

Abordant l'œuvre de l'écrivain et dramaturge Kateb Yacine, l'écrivain et homme de théâtre H'mida Ayachi a d'abord relaté sa rencontre durant les années 1970, avec "ce monument de la créativité" alors qu'il occupait le poste de directeur du Théâtre régional de Sidi Bel Abbès.

L'auteur de "Prophète de la désobéissance" (2011) a évoqué les facettes enfouies dans la personnalité de Kateb Yacine, qu'il n'exprimait qu'à travers une "créativité abondante aux formes esthétiques" à l'image des massacres du 8 mai 1945 et sa prise de conscience, sa rencontre avec la Révolution, son rapport à sa mère, sa relation avec l'histoire et l'Emir Abdelkader, ses préoccupations et ses errances.

"Le théâtre de Kateb Yacine, qui se joue sur une scène vide (...) se caractérise par la puissance du texte qu'il soutient avec des rites et des chants populaires", explique H'mida Ayachi, citant quelques uns de ses textes, écrits ou montés en spectacles.

La secrétaire générale de la Fondation "Emir-Abdelkader", Z'hor Assia Boutaleb est ensuite intervenue pour rappeler que l'Emir Abdelkader était aussi "rattaché à l'école doctrinale de la pensée d'Ibn Arabi et fut un des maîtres spirituels majeurs du soufisme contemporain" durant son exil à Damas (Syrie). Les enseignements qu'il prodiguait à ses disciples ont été rassemblés dans l'ouvrage "Kitab Al Mawaqif"(Le livre des haltes).

L'universitaire-traducteur des œuvres de Mohamed Dib, Mohamed Sari a, quant à, lui mis en valeur l'importance du travail de la traduction dans la récupération de la littérature algérienne "écrite dans la langue de l'autre". Il a fait remarquer que chez les écrivains algériens, "l'acte d'écrire est en soi une traduction" car l'emloi des langues dites "savantes"(l'Arabe ou le Français), ne sert qu'à traduire un imaginaire imprimé en "langue populaire" (dardja ou Tamazight), d'où cette "diglossie"(distance entre la langue d'écriture et celle de la réflexion) existante de fait dans la littérature algérienne.

L'universitaire spécialiste de Mohamed Dib, Amel Salhi a communiqué sur l'"engagement de Dib" dans ses écrits refusant de se conformer au "modèle de l'intellectuel imposé par l'occident".

Le romancier et maitre de conférence Fayçal Lahmar a abordé le thème de la littérature algérienne d'expression arabe traversant l'exil, à l'exemple de Ahlem Mosteghanemi.

La directrice de l'organisation de la diffusion culturelle au ministère de la Culture et des Arts, Djamila Mustapha Zeggai a présenté à l'assistance l'écrivaine exilée Fatima Bouregâa Gallaire, qui s'est servie de la langue de l'autre pour dire ouvertement et sans tabous, les travers de sa société d'origine, alors que l'universitaire Chahrazed Toufouti a évoqué "l'ambivalence de la présence et de l'absence" chez Assia Djebbar et son attachement à l'Algérie, citant, entre autres de ses ouvrages, "Une femme sans tombe" et "Les enfants du nouveau monde".

Célébrée le 17 octobre de chaque année, la Journée nationale de l'émigration marque les massacres commis par la police française contre des Algériens sortis manifester pacifiquement le soir du 17 octobre 1961 à Paris pour contester le couvre-feu décidé uniquement à l'encontre de la communauté algérienne.

 

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